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Jeudi midi au Monde du Vin

Par 18 septembre 2009avril 21st, 2013Non classé

Je profite de mes vacances sous le beau soleil alsacien (!) pour déjeuner avec Fabrice et Denis avec un programme plutôt inédit pour un jour de semaine : Riesling Spätlese trocken Haardter Bürgergarten « Im Gehren » 2004, Domaine Müller-Catoir ; Rasteau « Les Argiles Bleues » 2006, Domaine de Beaurenard. Plus tard, j’ai pris beaucoup de plaisir à regoûter le Gewürztraminer 2005, Domaine Maurice Schoech.


Initialement l’idée de prendre 2 semaines de vacances pour rester cloîtré chez soi peut faire peur. Mais arrivé au terme de mes vacances d’été assez inédites cette année, je me souviens du bon temps passé avec mes proches afin d’agrémenter ces jours de congés par de sympathiques retrouvailles. J’en avais besoin. C’est entre autres au cours de ce repas simple entre copains avec mon ami Fabrice et son collègue Denis que je m’aperçois que la belle vie ne demande pas grand chose : deux bouteilles de bon vin, un bon morceau de barbaque et beaucoup de convivialité suffisent.

J’avais pris des risques mercredi soir en annonçant que j’apportais une sacrée bouteille de blanc. Surtout que je ne savais pas trop dans quelle phase d’évolution se situait ce Riesling Spätlese trocken Haardter Bürgergarten « Im Gehren » 2004 du Domaine Müller-Catoir. J’en avais acheté douze directement auprès de cette magnifique propriété du Palatinat, la plus célèbre de ce petit vignoble tout proche de la frontière d’Alsace du Nord. Après moult hésitations, je profite de l’absence de Fabrice pour carafer délicatement le vin et le goûter. A vrai dire, il ne montre pas grand chose de prime abord. Je suis un peu circonspect et en attendant Fabrice, je me suis dit qu’il ne valait mieux pas trop la ramener… Finalement, ce vin fut riche en découverte car il est en pleine mutation. A l’aveugle, Fabrice et Vincent sont à la recherche du cépage et hésitent entre Riesling et Chenin car avec une belle trame élégante de fruits blancs, de pêche et de fleurs, le tout semble très exotique pour un Riesling. D’un autre côté, l’attaque minérale, vive et l’équilibre (relativement) sec les fait hésiter. D’ailleurs, nous nous empressons d’envoyer un email au domaine pour connaître l’équilibre sucre-acidité de ce vin. Car en bouche, c’est le terroir qui domine, un terroir calcaire qui mais l’accent sur la minéralité, la fraîcheur, avec une finale imposante qui rappelle de belles notes d’agrumes (citron, pamplemousse). Quoi qu’il en soit nous sommes d’accord pour dire qu’il est dans une phase de dégustation difficile car il semble en pleine mutation. Je ne cesse d’aérer le tout en secouant énergiquement cette carafe innocente avant de la ranger dans le frigo pour le fromage.

Entre temps Denis nous retrouve au magasin avec dans sa besace trois fromages. Lui le fromager de métier devenu commerçant aux Saveurs des Lys à Saint-Louis. Fabrice nous avait promis une pièce de viande parfaitement préparée par son boucher. Et quoi de mieux qu’une cuisson saignante pour profiter de la tendresse de ce rumsteack. En accompagnement, Fabrice nous sert une enième découverte : une beauté appelée Rasteau « Les Argiles Bleues » 2006, Domaine de Beaurenard. Issu d’une sélection des meilleures parcelles de Rasteau, il se caractérise d’emblée par sa robe grenat opaque aux reflets violacés qui me fait opter pour un vin du Rhône. Au nez, un bel ensemble complexe et fruité explose avec des notes de fruits noirs (mûre, cassis), de griotte avec une lente évolution sur les épices et la terre. Quelle expression de fruit, quelle distinction digne des plus beaux terroirs des Côtes-du-Rhône Nord… De plus ce vin séduit de par sa fraîcheur, sa minéralité qui proviennent directement de ce terroir argilo-calcaire unique. Pareil en bouche avec une attaque vive, fraîche sur la mûre et le cassis avec une touche de violette avant que les 80% de Grenache n’apportent le corps, la puissance et la longueur nécessaires pour supporter la richesse et l’extrait de ce Rasteau si singulier. A la fois les arômes de cerise, de terre, de bois (élevage) caressent le palais avant que la fraîcheur de la Syrah et une note remarquable de bourgeon de cassis ne resurgisse dans une finale longue et profonde. Notez par ailleurs que le Grenache se fond parfaitement dans l’ensemble avec une finesse et une profondeur remarquables si bien qu’à l’aveugle j’aurais plutôt opté pour 80% de Syrah dans la composition de ce vin qui est en réalité un accord parfait avec son terroir et… avec cette pièce de viande excellente ! Bravo pour cette découverte franchement exceptionnelle ! Avis aux amateurs, dépêchez-vous de mettre la main sur une des 8000 bouteilles produites par an à un prix très intéressant aux alentours des 17-20€.

Nous sommes bien rassasiés quand Denis nous dévoile les trois fromages du jour. A cette occasion, je ressors le reste de Riesling pour partir à la recherche de l’accord parfait avec l’un de ces trois fromages : le Bàrgkàs, le Saint-Nectaire et le Neufchâtel. Et force est de constater que cet assortiment crescendo est excellent. Alors que le Rasteau dévoile son côté terroir et Grenache au fil des dégustations de ces fromages affinés, le Riesling offre un accord exceptionnel avec le Neufchâtel. Fabrice lui décerne 9/10 quant à moi, je suis au anges car personnellement cet accord est parfait. La fraîcheur et l’exotisme de ce Riesling épanoui après un passage en carafe prolongé contraste idéalement avec la force, la puissance et le crémeux du Neufchâtel. Wow ! Superbe !

Fabrice et Denis, merci pour ce moment d’amitié et de convivialité de ce jeudi après-midi. C’est quand même bien les vacances dans le Sundgau finalement !

In vino veritas

PS: mention spéciale en cette fin de commentaire au Gewürztraminer 2005 du Domaine Maurice Schoech dégusté le soir-même en petit comité. Cette famille historique d’Ammerschwihr nous présente régulièrement des vins de cépage de très belle qualité. La philosophie des frères Schoech justifie cette recherche d’expression du cépage dans les cuvées classiques dont ce Gewürz 2005 qui regorge de fruit, de fleurs blanches, d’épices douces au nez, avant qu’un ensemble, vif, frais, expressif n’envahit le palais avec une belle maturité et du sucre résiduel certes mais qui est contre-balancé par une acidité vive qui se prolonge jusque dans une finale riche et épicée, et une sensation lactée que je retrouve souvent dans les meilleurs Gewürztraminer. En somme, une valeur sûre à un prix donné pour un maximum de plaisir. Pour lui-même à l’apéro ou à la fête sur le meilleur des Munster.