In Vino Veritas

Quand le vin s’invite au cinéma…

Thème original pour cette Soirée 20 où nous avons tenté de rassembler vin et cinéma. A la vision de votre prochain film, vous verrez peut-être un Mâcon-Villages 2013 de Louis Jadot, un Lubéron « Coin Perdu » 2013 du Château de la Canorgue ou encore Napa Valley « Papillon » 2007, Orin Swift. En revanche peu de chance d’apercevoir un Riesling Grand Cru Brand Vendange Tardive 1997 du Domaine Josmeyer. Mais qu’est-ce que c’était bon !

Pour cette nouvelle Soirée 20 organisée par Audrey, le thème fut des plus originaux : le vin et le cinéma… L’association peut peut-être vous sembler loufoque, pourtant combien de grandes bouteilles ont déjà été dégustées par les stars du 7è Art ? Vous vous souvenez certainement des meilleures cuvées de Champagne Bollinger dans chaque épisode de James Bond, de la dégustation à l’aveugle du Château Léoville-Las Cases 1953 par Louis de Funès dans l’Aile ou la Cuisse ou encore de les débats très vifs entre Jacques Villeret et Thierry Lhermitte dans le mémorable Dîner de Cons de Francis Veber avec un Château Lafite-Rothschild 1978 qui tourne au vinaigre ! Bien sûr les références sont nombreuses, et bien que souvent les étiquettes des vins ne soient pas franchement visibles, certaines bouteilles n’échappent pas à vos yeux avertis.

Dîner de Cons de Francis Veber avec un Château Lafite-Rothschild 1978

 

J’ai eu la chance d’être exonéré de recherche pour cette soirée et au vu des difficultés qu’ont eues les participants à trouver la perle rare, je me sens plutôt privilégié ! Nous nous retrouvons en ce dimanche soir autour d’un buffet libanais, Benoit sera malheureusement le seul absent de dernière minute alors qu’il avait déniché deux bouteilles qui collaient parfaitement au thème… D’un autre côté Lionel a abdiqué devant la difficulté de trouver un vin servi au cinéma. Mais qu’importe, nous nous retrouvons dans notre nouvelle cuisine avec un premier vin offert par Yannick en référence au film américain récent, Ironman 3. En bon cinéphile, il avait tout prévu sauf que la bouteille de Mâcon-Villages 2013 de Louis Jadot servie dans cette super-production hollywoodienne ne lui soit livrée trop tard par son caviste… Visiblement abattu, il tente de retrouver le moral avec un Mâcon-Villages 2013 d’Antoine Barrier. Cette marque est réservée à une sélection de vins de négoce pour la chaîne de grande distribution E.Leclerc. Sa couleur pâle et sa robe brillante précèdent un nez plutôt fermé et réduit, empreint de notes animales puis de citrus et de minéral. Sa bouche lactée suggère un Chardonnay avec un beau gras et une fraîcheur décente même s’il manque cruellement de précision. Le vin est relativement banal surtout le 2è jour où les amers prédominent dans une fin de bouche fluette et aqueuse. Mais pour 5€, il est difficile de faire mieux…

Nous nous réconcilions avec le vin de Lionel, le Riesling Grand Cru Brand Vendange Tardive 1997 du Domaine Josmeyer, même s’il est hors thème… La famille Josmeyer, basée à Wintzenheim près de Colmar, a construit sa réputation sur la finesse et la pureté de ses vins blancs. Chaque amateur se doit d’avoir quelques vins de cette propriété dans sa cave ! Surtout que ce vin est encore disponible à la vente pour ceux qui le souhaitent… Sa robe dorée brillante annonce une certaine évolution, son nez chaud et brûlé par le granit donne une indication par rapport à son origine. Des notes de citron confit, de noix puis finement pétrolées et huilées habillent cet ensemble chaleureux, puissant et rond. Le tabac et les fleurs séchées ajoutent à la complexité de cette vendange tardive. La bouche est délicate car le sucre résiduel (39g/L) adoucit la trame acidulée du cépage. L’équilibre est tout naturel entre la singularité de la roche granitique, la force sûre du Riesling et le velouté envoûtant de cette vendange tardive dans un grand millésime. Il se prolonge avec une fine amertume (quinine, zeste d’orange) et une longueur interminable. Ce vin aérien ira loin dans le temps car il a cet équilibre rare et une noble origine. Nos aïeux alsaciens disaient déjà il y a très longtemps : « Im Brand findet man den besten Wein im Land », comprenez « On trouve dans le Brand le meilleur vin de la région… » Ils ne pouvaient pas se tromper !
Retour au 7è Art avec la référence à un joli film américain tourné dans le Sud de la France. Vous connaissez l’affection toute particulière des américains pour la Provence : le film Le Coin Perdu (A Good Year) relate très bien cette histoire d’amour tout en faisant référence au vin du Lubéron « Coin Perdu » 2013 du Château la Canorgue. Des vignes centenaires de Syrah, de Grenache, de Carignan et de Mourvèdre entrent dans l’assemblage de cette cuvée hédoniste. Son nez est dominé par des arômes de fruit noir et de cerise puis d’épices et de menthe. Son attaque vive et franche joue sur des notes rafraîchissantes de réglisse et de violette. Son fruité pimpant nous séduit même si la longueur en bouche est relativement moyenne. J’ai eu la chance de pouvoir le regoûter le deuxième jour et là encore, son nez brille par la pureté de son fruit (cassis, cerise noire, mûre, aération épicée). Plein, généreux et très typé Syrah en bouche, ses tannins sont encore rugueux et légèrement astringents. De fait il promet aujourd’hui plus au nez qu’en bouche mais laissons-lui le bénéfice de quelques années de vieillissement.

« A good year » de Ridley Scott a été tourné au château de la Canorgue, avec Russell Crowe et
Marion Cotillard.

 

Nous terminons ce voyage en Californie, en référence au film Papillon sorti en 1973 avec Steve McQueen et Dustin Hoffmann. Cette interprétation autobiographique du roman d’Henri Charrière raconte les péripéties et les tentatives d’évasions du bagne de Cayenne d’un détenu surnommé « Papillon ». C’est avec le Napa Valley « Papillon » 2007, Orin Swift Cellars que nous concluons en beauté cette soirée Ciné’vin. La propriété d’Orin Swift est basée dans le Nord de la Napa Valley et a été créée en 1998 par David Swift Phinney après une visite d’inspiration en Italie et un an en tant qu’intérimaire chez Robert Mondavi. Une success story à l’américaine donc, d’autant plus que cet assemblage à dominante de Cabernet Sauvignon (62%), complété de Petit Verdot, de Merlot, de Cabernet Franc et de Malbec nous a franchement scotchés ! Presque noir d’aspect, il dévoile des notes cuites de fruit noir, de réglisse puis de coco et de vanille dans un ensemble suave, confit et presque madérien. Passé quelques temps dans le verre, il s’assagit sur la griotte et le fruit noir. Son attaque en bouche est puissante, brûlée et empreinte de fruit noir sucré et vanillé. Néanmoins ses 15.2% d’alcool s’intègrent très bien avant que la finale, longue et persistante, ne révèle une acidité sapide et presque saline sur des notes caramélisées. Avec un jour de plus, le tout apparaît avec plus de finesse en bouche, certes la puissance revient en fin de bouche mais sa texture suave nous envoûte sans mal. Un plaisir suave ! Miam…

L’étiquette de la bouteille « Papillon » de Orin Swift Cellars

 

Je ne pourrais conclure ce commentaire sans remercier Audrey pour l’organisation de cette soirée et l’invention de ce thème original. Finalement, et sans le savoir vraiment, le vin se retrouve bien souvent au cinéma. Je ressens désormais comme un réflexe compulsif à la vision d’une bouteille de 75cL à l’écran, sans doute par peur de devoir trouver une bouteille pour la prochaine édition de cette soirée Ciné’vin. Car au vu de notre amusement lors de cette réunion conviviale, il est fort à parier qu’il y ait, un jour, un deuxième opus de cette saga. En espérant qu’il soit encore meilleur que cette version originale…

 

In vino veritas

 

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