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Les 2015 de Claudine Rominger

Par 1 mars 2017mars 6th, 2017Non classé

Claudine Rominger a retrouvé les Avinturiers à l’occasion d’une soirée de présentation de son tout premier millésime. Beaucoup de vins sont encore en cours d’élevage mais quelques pépites sortent d’ores et déjà du lot, en particulier les crus du Grand Cru Zinnkoepflé à Westhalten, terre de prédilection des meilleurs vins du domaine.

 

 

Claudine RomingerLe Domaine Rominger n’est plus à présenter, surtout pour les lecteurs de ce blog. Plus d’un an après la disparition d’Eric, son mari, parti bien trop subitement un jour d’automne 2014, Claudine Rominger a repris le flambeau de manière exemplaire avec le soutien de ses enfants et d’une équipe soudée. Elle poursuit désormais les activités d’entretien du vignoble, de production et de vinification avec une force qui inspire au plus grand respect. A l’aube de Millésime Bio Claudine Rominger est venu au Restaurant Au Canon d’Or pour nous présenter son tout premier millésime. Toujours à l’écoute de ses clients elle nous a aussi confié les doutes qu’elle a eu au cours du cycle de ce millésime 2015 pourtant si encensé par la critique. « Je n’ai jamais vendangé des raisins aussi bons » nous dit-elle pourtant même si cette année fut particulièrement difficile à gérer : d’abord froid et sec puis trop chaud en fin de cycle, les changements climatiques ont été multiples. Au final Claudine fait l’apologie de ce millésime tardif qui a produit des raisins bien mûrs, riches et concentrés, avec des bons niveaux de sucre. « Relativement facile » à vinifier selon elle, il a généré des vins aux beaux équilibres. Elle a aussi bénéficié des bienfaits de la biodynamie que le domaine pratique depuis 2000.

 

Sur les conseils de Claudine nous débutons avec les vins rouges et plus particulièrement avec le Pinot Noir 2015 qui a bénéficié au total de 8 mois d’élevage en foudre. Si l’on sent encore le bel enrobage du fruit, nous nous régalons avec la souplesse et l’élégance de ce jus au palais. Malgré la maturité de l’ensemble ce vin fait preuve de beaucoup de peps ! Final chaleureux sur la griotte et le noyau de cerise. Le Pinot Noir Strangenberg 2015 provient d’une terroir situé à l’entrée de la combe de Westhalten et qui se caractérise par son sol très calcaire. Claudine a tenté une vinification avec une moitié de vendange entière, le tout dans des barriques neuves (chauffe légère). La robe violacée est très sombre, le nez dévoile un fruit noir très mûr puis l’ensemble se distingue par une grande concentration en bouche ainsi que des tannins vifs, juteux, presque nerveux. Il doit encore un peu s’assagir : ça tombe bien car l’élevage sera prolongé jusqu’en automne 2017… A suivre !

La longue série des vins blancs s’ouvre avec un superbe Sylvaner 2015 nommé « Z » en raison de sa provenance, le Grand Cru Zinnkoepflé et plus précisément une petite parcelle en haut de coteau plantée en 1999. Ce cépage réussit plutôt bien à la marque de ce terroir solaire mais somme toute minéral. Elevé en barrique, fermentation aboutie pour atteindre un équilibre quasi-sec (malolactique faite), il se montre déjà très à l’aise sur des arômes de vanille et de pêche blanche, le tout sur un fond minéral. Le fruit blanc jaillit en bouche puis évolue sur des tons exotiques, de poire et de réglisse. Ensoleillé mais doté d’une belle fraîcheur malgré la chaleur du lieu, il s’allonge dans une belle finale. Une réussite, sans l’ombre d’un doute !

Riesling Steinstück 2015 - Rominger

4 Riesling proposent un crescendo des plus intéressants avec tout d’abord le Riesling « Steinstück » 2015 qui reste comme d’habitude un de mes chouchous. Issu d’un amphithéâtre calcaire niché entre le Stangenberg et le Zinnkoepflé, cette cuvée provient de 2 parcelles dont une plantée à haute densité afin d’atteindre une maturité du raisin plus précoce dans le but de maintenir une belle structure acide. Sa belle robe éclatante précède un ensemble minéral, citronné mais encore discret à ce stade : seuls des notes de sel et d’anis s’affirment légèrement. La concentration de l’ensemble est remarquable dès l’attaque en bouche puis toute la droiture et la tension du vin apparaissent. Riche et mordant, voici un joli contraste qui promet de s’épanouir favorablement dans les prochaines années (2g/L de sucre). Le Riesling « Schwarzberg » 2015 provient d’un terroir de marnes gréseux en décomposition, proche des meilleurs crus de la colline de Guebwiller. Plus consensuel que son « meilleur ennemi » il propose un nez plaisant et élégant de notes fumées et de fruit confit. L’élégance se poursuit en bouche où les fruits exotiques et la pomme au four dansent sur un joli fond crayeux (8g/L de sucre). A attendre tout comme le vin précédent.

Riesling Saering & Zinnkoepflé 2015 - RomingerPlace aux Grands Crus avec un Riesling Grand Cru Saering 2015 étonnamment concentré et doté d’une finesse miellée singulière sur ce terroir qui observe la plaine du haut de sa colline. La bouche propose un contraste entre la richesse du millésime (agrumes confits) et la minéralité du lieu, faite d’amers (quinine) et de pierre. Fin et long, il se démarque particulièrement sur la sauce aux morilles du plat proposé par Gilles Reeb (2g/L de sucre). Pour finir le Riesling Grand Cru Zinnkoepflé 2015 est le plus complexe de tous à ce stade, mais peut-être aussi le plus exubérant : doté de 11g/L de sucre il propose des arômes subtils d’herbes aromatiques, de fruits jaunes et de zan. La bouche est vibrante malgré la rondeur caractéristique du millésime : le caramel, la girofle et l’orange se distinguent tout comme un côté levuré qui témoigne de la jeunesse de l’ensemble. Sa minéralité tranchante ainsi que cette fine exubérance nous accompagne jusque dans un final long, salivant et élancé. Les Riesling proposés dans cette série brillent certes par leur générosité typique du millésime mais restent très bien calibrés grâce à une acidité sous-jacente typique des meilleurs terroirs et des bienfaits de la biodynamie.

 

Le Pinot Gris 2015 propose un nez vif pour le cépage ainsi qu’une évolution fumée, riche et fruitée. Claudine Rominger poursuit l’idéal de cette cuvée d’entrée de gamme en recherchant un vin sec ; la vendange doit être précoce et malgré cela, ce Pinot Gris a tendance à monter dans les degrés. En résulte un vin gras, bon et plein qui a gardé une belle énergie malgré sa richesse. Le Pinot Gris « Schwarzberg » 2015 est digne de son terroir en proposant une aromatique élégante et généreuse sur la maturité du fruit blanc, la poire et quelques notes fumées. Richesse élégante mais chaleur tout de même, il lui faut un peu de temps pour s’affiner malgré un ensemble complexe de caramel , de beurre salé, de coing et de fruit confit. Un jeune costaud.

Le Gewurztraminer « Luss » 2015 provient d’un terroir calcaire situé en face du Grand Cru Zinnkopeflé. Ce vin à l’équilibre quasi-sec (4g/L de sucre) se montre déjà sous son meilleur jour grâce à une pureté et une finesse à la fois minérale, florale et complétée par le pain d’épices. Sa bouche épicée titille le palais (poivre de Séchuan), malheureusement il y a un petit creux en milieu de bouche ainsi qu’une pointe de verdeur. Nous débattons avec Claudine au sujet de la date des vendanges, peut-être un poil trop précoce… A regoûter dans quelques temps pour confirmer. Celui qui ne doute pas, c’est bien lui : le Gewurztraminer Grand Cru Zinnkoepflé 2015, quoiqu’un peu discret au premier nez, il s’ouvre peu à peu sur une belle palette d’épices et le chocolat blanc. Quelle classe en bouche, à la fois éclatante et tendue et supportée par des amers nobles en finale. Claudine confirme, c’est bien le terroir idéal pour le Gewurztraminer ! Clément, dans sa bonté, nous a apporté un Gewurztraminer Grand Cru Zinnkoepflé 2010 qui monte encore d’un cran. Déjà presque épanoui, cet adolescent fleure bon le litchi, la fleur blanche, la rhubarbe et le coing. Bouche exquise, fraîche mais dotée d’une grande concentration fruitée. C’est déjà excellent mais le potentiel de garde est grand. La classe, tout simplement !

Gewurztraminer Zinnkoepflé 2010 - Rominger

Nous terminons avec deux vins hors catégorie : tout d’abord Ozmose 2015, le fameux vin issu d’une complantation sur le Grand Cru Zinnkoepflé. Ce vin est vinifié en demi-muids et nous offre un nez encore discret mais profond et complexe de pomme, de fleur blanche, de coing sur un fond de calcaire (plâtre). L’attaque en bouche est riche, fidèle au millésime 2015 (et à l’exposition sud du terroir), mais se distingue des autres vins par un toucher élégant, fin et confit. Son équilibre est magistral, à la fois franc, et chaleureux mais aussi élégant et digeste. Superbe ! Enfin le Gewurztraminer Grand Cru Zinnkoepflé Vendange Tardive 2015 est le seul vin moelleux proposé cette année. Poussiéreux, fumé de prime abord, il évolue sur le litchi, la fleur fanée et le fruit confit. La bouche est bourrée d’énergie, à la fois joyeuse et ensoleillée, lactée et concentrée jusque dans une finale longue, douce et veloutée.

 

Claudine Rominger peut en somme être fière de son millésime 2015. Elle a su dompter sa chaleur et ses aléas pour produire des vins fidèles à cette année exceptionnellement généreuse mais tout en conservant ce qu’il faut d’équilibre et de fraîcheur ; sa persévérance et sa soif d’apprendre n’y est pas pour rien. Là encore, alors qu’elle parle passionnément de ses vins, elle cherche encore et toujours à se perfectionner : d’ailleurs il n’est pas rare de la voir participer à des cours et à des ateliers avec d’autre illustres vignerons alsaciens. C’est grâce à cette persévérance qu’elle continuera à tutoyer les sommets et à porter haut les couleurs de la famille Rominger.

In vino veritas