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Réunion du Comité des Avinturiers

Par 12 décembre 2013décembre 16th, 2013Non classé

Depuis la création de l’association des Avinturiers il y a quelques mois, le comité que je préside se réunit régulièrement pour définir les thèmes des soirées à venir. Cette fois-ci nous nous sommes retrouvés chez Benoit pour fixer les dates du premier semestre 2014. Avec, évidemment, quelques bouteilles pour agrémenter les discussions : Champagne Louis Roederer Brut Premier ; Puligny-Montrachet 1er Cru Les Combettes 2007, Domaine Leflaive ; Chassagne-Montrachet 2009, Domaine Ramonet ; Gevrey-Chambertin Vieilles Vignes 2003, Bernard Dugat-Py ; Morey-Saint-Denis 1er Cru Les Loups 2003, Domaine des Lambrays ; Clos de Tart Grand Cru 2004, Mommessin ; Corton-Charlemagne Grand Cru 1999, Domaine Bonneau du Martray ; Côteaux de l’Aubance Les Trois Schistes 2010, Domaine de Montgilet.


Dégustation de vin avec les avinturiers

Les Avinturiers représentent une association des dégustateurs indépendants qui se démarque de tout intérêt économique lié à quelconque affiliation. L’objectif de ce groupe d’amateurs est finalement très simple : en cette période d’uniformisation du goût et de standardisation du vin, nous souhaitons faire la promotion de cavistes et de vignerons de talent pour qui l’expression du terroir est la priorité numéro 1. Par ailleurs nous nous démarquons aussi des extrêmes liés au « tout bio » et restons ouvert à toutes les pratiques qui permettent de restituer la typicité des vins de chaque région. Nous poursuivons en somme avec passion cette recherche à la fois simple et louable… du « bon » !
Depuis la création de cette association en septembre dernier quelques membres se sont efforcés de nouer des contacts avec plusieurs acteurs du Monde du Vin qui poursuivent cet idéal. Vous retrouverez ici un exemple de soirée qui nous a fait vibrer avec la dégustation sur plusieurs millésimes du Mâcon « Quintaine » du Domaine Guillemot-Michel ou encore ici la sélection d’une caviste de talent, Marie-Jo Bauer.

Les membres du Comité des Avinturiers se sont donc retrouvés cette semaine chez Benoit pour discuter des prochaines échéances. Comme vous pouvez l’imaginer les retrouvailles entre amateurs riment aussi avec le partage de bonnes bouteilles, c’est pourquoi notre hôte du soir nous a concocté un repas digne pour accompagner tous ces vins. Avant de passer à table nous nous devions encore de baptiser l’association. Depuis les premières soirées, Philippe souhaitait sabrer le Champagne en l’honneur des Avinturiers : ce fut chose faite lors de cette soirée, non sans mal, avec une bouteille de Champagne Brut Premier de Louis Roederer. Nous sommes tous unanimement surpris par la qualité de ce Champagne qui n’aurait aucun mal à soutenir la comparaison avec son aîné Cristal Roederer dont je ne reste pas toujours convaincu de la grandeur. Sa belle couleur dorée et sa bulle fine s’ouvrent sur un nez qui mêle le fruit blanc, la vanille et un grillé toasté élégant et pleinement intégré. La bouche reprend cette bulle fine qui supporte un ensemble harmonieux et de belle consistance. Elégant au palais il termine sur une note chaleureuse ; la finale est longue, un peu amère, mais laisse une plénitude singulière pour un Champagne de marque comme celui-ci (comprenez produit à des millions de bouteilles par an)…

Après cette mise en bouche nous passons à table et goûtons sans attendre au Puligny-Montrachet 1er Cru Les Combettes 2007 du Domaine Leflaive en accompagnement d’un excellent velouté de panais au chips de jambon Serrano. Sa belle couleur dorée précède un nez d’une grande maturité après une aération préalable. Il dévoile des notes de yaourt au citron, de noisette, de caramel et de mandarine. L’attaque en bouche est superbe, à la fois fraîche et dotée d’une superbe matière. Le tout s’ouvre avec harmonie et élégance malgré un enrobage boisé important qui l’empêche quelque peu de s’exprimer. La persistance de ce vin est superbe, il reste en bouche pendant de longues minutes, dommage qu’il soit à ce point pénalisé par cet excès de bois. Nous sentons tous que la matière première de ce Puligny est de grande qualité, malheureusement l’élevage n’a pas pu retranscrire toute la grandeur de ce terroir des Combettes… Il est suivi par le Chassagne-Montrachet 2009 du Domaine Ramonet. J’ai dû attendre 30 ans pour boire du Ramonet pour la première fois et voici que j’ai la chance d’en goûter à une semaine d’intervalle après ma magnifique rencontre avec les Gobeloteurs fin novembre (voir par ailleurs) ! D’ailleurs le jéroboam (vide) du Chassagne-Montrachet 1er Cru Morgeot 2005 trône encore sur la commode de la salle à manger de Benoit… Revenons-en à ce Chassagne village issu d’un millésime solaire qui se montre très discret au nez de prime abord. L’évolution dans le verre est lente mais complexe et révèle le bonbon, les agrumes, les fruits exotiques et le végétal. La bouche, fraîche en attaque, s’ouvre sur une matière exubérante et chaleureuse. La rondeur de ce vin colle à la philosophie du domaine et du millésime même si le tout ne bascule pas dans l’excès. L’équilibre chaleureux de ce vin en ferait un accompagnement idéal sur de la cuisine thaï, tout comme son prédécesseur d’ailleurs. 

Filet de boeufGevrey VV Dugat-Py

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous ouvrons ensuite une série de vins rouges pour accompagner le filet de boeuf, sauce aux champignons et haricots plats préparé avec passion par notre chef cuistot. Une fois de plus nous faisons honneur à la Bourgogne et ce, sans préméditation ! J’ouvre avec attention le Gevrey-Chambertin Vieilles Vignes 2003 de Bernard Dugat-Py que j’avais apporté. Le bouchon n’a pas bougé d’un iota ce qui justifie la relative jeunesse du nez. Avant cela nous observons une couleur sombre et soutenue avec de légers reflets qui suggèrent quelques années d’âge : ceci est caractéristique des vins de ce producteur qui recherche une grande extraction et une expression intense du fruit. Le fruit, justement : le nez est complexe et encore très jeune et décline la cerise dans tous ses états (burlat, griottine, cerise au kirsch). La mûre, les airelles complètent ce nez étonnamment friand avec un soupçon de balsamique, d’épices (cannelle, herbes séchées) avec une évolution légère sur la viande grillée. La bouche révèle toute la pureté du fruit avec des touches de fraise, de cerise et de fruit noir. Toujours en grande forme pour son âge, il évolue avec rondeur, élégance et fraîcheur malgré la générosité du millésime. La fin de bouche dévoile un boisé léger et se montre très chaleureuse même si plus de longueur aurait été souhaitable. Toutefois personne n’aurait pensé que ce vin ne provienne d’une année aussi caniculaire car il a su garder un bel équilibre et une jeunesse étonnante.
Il me plaît plus que le Morey-Saint-Denis 1er Cru Les Loups 2003 du Domaine des Lambrays. Ce vin est issu des jeunes vignes du Clos des Lambrays. Son nez discret reprend de belles notes fruitées mais évolue plus rapidement sur des arômes secondaires. La bouche est facile, gouleyante et très approchable car il y a dans ce vin un côté légèrement sucré. Le fruit noir évolue dans un registre plus sauvage avec des notes de sous-bois qui s’accordent bien avec la viande et la sauce. Cependant je ne le trouve pas au niveau d’un 1er Cru.

Clos de Tart 2004Pour terminer cette série de rouges Jean-Michel nous fait l’honneur de partager avec nous le Clos de Tart Grand Cru 2004, Mommessin. Il s’agit évidemment d’un monument de la Côte de Nuits issu d’un Clos de 7.5ha dans le village de Morey-Saint-Denis. Ces 15 dernières années, la renommée de ce cru a grandi proportionnellement avec son prix qui frôle aujourd’hui les 300€ à la propriété… Heureusement que certains d’entre nous ont pu sécuriser quelques quilles à des prix plus raisonnables avant le boom des années 2000. Vous pourrez lire ou relire ici mon commentaire du Clos de Tart 1997 bu déjà à deux reprises par le passé, toujours avec une grande émotion. Ce Clos de Tart 2004 joue dans registre différent car il exprime d’emblée tout son raffinement et toute sa profondeur au nez : les fleurs sont nombreuses, le fruit rouge est fin puis le café, les épices et la réglisse jaillissent tour à tour avant que le tout n’évolue sans cesse sur la rose fanée, le lard et le sous-bois. La complexité de ce nez est déjà digne d’un Grand Cru ! La bouche est d’une grande fraîcheur mais encore très jeune, presque gainée, car elle n’exprime pas encore tout son potentiel. Le palais se développe peu à peu dans un registre fruité et floral discret mais follement élégant. La matière n’est pas exubérante mais l’équilibre du vin est royal : il s’étire tout en verticalité et épouse fabuleusement ce millésime élégant et discret. Long et tendu en finale, il laisse une superbe trace persistante.

 

Corton Charlemagne 1999 BMLe fromage arrive et fait honneur aux vins blancs. D’ailleurs si vous ne buvez que du vin rouge avec le fromage, n’essayez qu’une seule fois d’accompagner un Comté avec un Savagnin, un Brillat Savarin avec un Champagne ou encore un fromage de chèvre avec un Sauvignon blanc et vous serez conquis… Comme nous avec le Corton-Charlemagne Grand Cru 1999 du Domaine Bonneau du Martray. Offert gracieusement par Christian, il me rappelle la dégustation de l’exceptionnel Corton-Charlemagne 2002 du même domaine lors de ses 50 ans (voir par ailleurs). Le plateau de fromages préparé par Benoit (avec un Comté jeune, un fromage de chèvre et un Brillat Savarin) est le partenaire presque idéal pour mettre en valeur ce superbe vin. D’emblée sa belle robe jaune pâle aux reflets tilleul ne montre aucun signe d’évolution. Le nez est porté par de belles notes d’ananas, de fruits exotiques, de yaourt supportés par une minéralité pénétrante. On soupçonne une grande maturité du raisin qui évolue ensuite lentement sur le citron confit et la cire d’abeille. L’attaque en bouche est saline, fraîche et pleine de finesse. Son côté lacté réapparaît au palais mais c’est avant tout la fraîcheur ainsi que la pureté du fruit qui prédominent. La finale, sapide, longue et à l’acidité tranchante montre que ce grand vin a encore un potentiel phénoménal. Il n’y a aucun signe de bois malgré un côté envoûtant et rond en finale. Tout simplement bluffant de jeunesse et de pureté, certains d’entre nous lui donnaient allègrement 10 ans de moins ! Grand Vin !

Pour finir nous avons droit à une ultime bouteille pour accompagner une salade d’ananas beurrée (…) Le Côteaux de l’Aubance Les Trois Schistes 2010 du Domaine de Montgilet vous dit peut-être quelque chose puisque nous l’avons beaucoup apprécié lors du dernier Salon des Vins du caviste mulhousien Georges Henner (voir ici). Voici ce vin en chiffres : 21.5° de potentiel à la récolte, 180g/L de sucre résiduel et 4.5g/L d’acidité ! Le résultat en bouteille est spectaculaire, le nez dévoile un superbe botrytis à travers des notes de coing, de safran, de pâte de fruits (pomme, poire, orange) puis de tabac de cannelle et de citron confit. Très fruité, très expressif, il s’exprime en bouche avec harmonie, profondeur et laisse une sensation fraîche en finale. La pelure de pomme, la tarte Tatin ainsi que des notes caramélisées se distinguent au palais puis en rétro-olfaction. Il s’agit sans doute d’un vin très bien fait qui gagnera à être carafé si vous le buvez dans sa jeunesse. En effet je me souviens d’un vin plus expressif lorsque nous l’avons dégusté il y a un mois et demi…

 

Ceci conclut une superbe soirée au cours de laquelle nous avons non seulement bu de très beaux flacons mais aussi fixé un programme alléchant pour le premier semestre de l’année prochaine. Les Grands Crus ont tenu leur rang et ont donc dominé les débats : le Clos de Tart, dans l’élégance et la distinction, puis le Corton-Charlemagne dans la pureté et l’expressivité. Merci Benoit pour l’organisation de cette réunion du Comité ainsi que la préparation du dîner. Longue vie aux Avinturiers !

In vino veritas