Quoi de mieux qu’une raclette pour finir 2013 entre amis lors de l’ultime Soirée 20 de cette année ? Afin de préparer nos estomacs aux repas de fêtes nous nous sommes retrouvés chez Sébastien avec quatre vins blancs pour l’occasion : Criots-Bâtard-Montrachet Grand Cru 2004, Jean Bouchard ; Féchy Le Brez 2012, Domaine La Colombe ; Chassagne-Montrachet 2009, Bouchard Père et Fils ; Alsace OZMOSE 2008, Domaine Rominger.
Les fêtes de fin d’année approchent à grand pas. Malgré cela nous avons encore réussi à synchroniser nos agendas pour nous retrouver une dernière fois tous ensemble cette année pour la dernière Soirée 20 de 2013. A la fois de saison et facile à préparer, la raclette semblait comme une évidence pour agrémenter nos retrouvailles gargantuesques…
Les invités se retrouvent autour d’une table joliment garnie de tous les accompagnements nécessaires à une raclette réussie. Lio avait proposé d’apporter la bouteille de l’apéritif avec le Criots-Bâtard-Montrachet Grand Cru 2004 de Jean Bouchard qu’il est judicieux de placer avant le plat… Je ne connaissais pas ce négociant dont le nom se rapproche étrangement d’une autre grande maison beaunoise, Bouchard Père et Fils, mais qui est en fait dans le giron d’une autre grande maison de négoce beaunoise, Albert Bichot. Son vin est issu de raisins provenant d’une toute petite appellation de 1.57ha uniquement située sur la commune de Chassagne-Montachet, en contrebas du Grand Cru Bâtard-Montrachet. Elle tient son nom de son sol calcaire pierreux (criots), bâtard venant du partage des parcelles du Comte de Puligny à son fils aîné (le Chevalier), ses filles (les Pucelles) et le petit dernier (le Bâtard). Passé cet intermède historique laissez-moi vous conter mes notes de dégustation ! Sa couleur dorée prononcée annonce un vin avec quelques années qui s’ouvre sur un nez fumé et poussiéreux de prime abord. La matière est présente et s’affirme à l’aération en prenant des nuances de pomme mûre, de noisette et d’agrumes (signalons que ce vin a été carafé une heure avant la dégustation). Cette richesse se retrouve en bouche dès l’attaque : le gras et la matière s’imposent sans attendre et mettent en valeur des arômes de cacahuète et de noisette grillée qui dénotent l’élevage. Le corps imposant de ce vin révèle toute sa puissance et domine la minéralité du terroir, cependant ce Criots termine sur des notes de charbon et de fumée dans une finale persistante et sapide. Un bel exemple de Grand Cru ! Merci Lio !
Nous revenons sur Terre avec un vin plus terre à terre qui est prévu pour attaquer la raclette. Quoi de mieux qu’un vin suisse pour entamer les réjouissances : le Féchy Le Brez 2012 du Domaine La Colombe est l’oeuvre de Raymond Paccot, un biodynamiste convaincu que nous aurons bientôt la chance d’accueillir pour une dégustation exceptionnelle de l’association des Avinturiers. C’est un amoureux de la Terre qu’il travaille avec le plus grand des respects ; son but ultime est de restranscrire le meilleur de chaque terroir et de chaque cépage dans la bouteille. Sans recours aux produits de synthèse, avec une utilisation mesurée du soufre et un élevage prolongé sur lies fines. Encore jeune ce Brez m’avait déjà impressionné cet été sur le millésime 2011, quand je m’étais surpris d’avoir siroté une demie-bouteille avec la plus grande des facilités… Ce 2012 à la robe très claire s’ouvre sur l’aubépine, l’églantine puis le poivre blanc enrobés dans la poire, les fleurs blanches avec un brin d’eucalyptus. Complexe au nez il se prolonge dans une bouche minérale, aérienne mais encore perlante. Les épices et la poire s’expriment encore et toujours avec élégance et complexité. La finale, moyennement longue et finement amère, révèlera tout le terroir calcaire du Brez après plusieurs années de garde. Bien vu, et belle affaire, dans l’attente de notre rencontre prochaine avec Raymond Paccot… Personnellement je trouve qu’il méritait mieux qu’une raclette !
Pas comme le Chassagne-Montrachet 2009 de Bouchard Père et Fils. Tout le monde fut unaniment outré par la qualité de ce vin qui ce vend tout de même 23€ en grandes surfaces… Son nez, que l’on pensait discret de prime abord, ne propose finalement que de vulgaires notes vanillées sans originalité. La bouche est elle aussi standard et sans relief. Certes la raclette n’est pas le meilleur accord pour un Chardonnay riche comme celui-ci mais même après l’avoir regoûté, nous ne pouvons qu’être déçu de cette piètre performance. Imaginez la déception de la personne qui nous a fait boire une telle infamie pour un Chassagne-Montrachet car évidemment, ce vin ne mérite pas du tout de porter un tel nom (je parle de l’appellation bien sûr)…
Nous reprenons nos esprits avec une surprise apportée par Benoit. Ou plutôt le fruit d’un secret jalousement gardé par notre ami et vigneron Eric Rominger qui a vinifé ce vin sur plusieurs millésimes depuis plus de 10 ans sans jamais le mettre sur le marché… L’Alsace OZMOSE 2008 du Domaine Rominger est le fruit d’une complantation réalisée dans le Grand Cru Zinnkoepflé. Les premiers millésimes (jusqu’à 2006) sont issus d’un assemblage de plusieurs parcelles mais depuis 2007, OZMOSE est le fruit d’une complantation de 4 cépages (Gewurztraminer, Riesling, Pinot Gris et Sylvaner) plantés côte à côte et vinifiés ensemble. Nous avons souvent parlé avec Eric de son intention de révéler au mieux le caractère de ce Grand Cru Zinnkoepflé et je dois dire que le résultat est concluant. Le nez exhale subtilement une multitude d’arômes de pomme mûre, de tarte Tatin, d’ananas confit et de pâte de coing. L’évolution au nez est spectaculaire et révèle tour à tour la noix de coco, les fruits exotiques, la pêche jaune, le tout est relevé par les épices (cannelle, badiane, anis). Le carafage de ce vin a permis de mettre en avant la complexité naissante du nez. La bouche marque le caractère solaire du cru mais avec un superbe équilibre acide qui apporte une fraîcheur tranchante et confère longueur et persistance. Le caramel, l’amande et les épices resurgissent dans une finale profonde. Ce superbe vin tout en nuances est au tout début de sa carrière et offre un grand plaisir pour lui-même. Le sucre est encore présent mais parfaitement soutenu. La classe par Rominger !
Pour information vous pouvez retrouver les commentaires de dégustation de mon ami Jean-Michel qui a eu la chance d’assister à une verticale de 10 millésimes lors de la soirée de lancement d’OZMOSE à Westhalten il y a quelques jours (voir ici).
En somme nous avons eu droit à plusieurs découvertes et à une confirmation : ce jeune Chasselas de Raymond Paccot m’a personnellement ouvert l’appétit à d’autres vins de sa gamme, vous en saurez plus à la fin du 1er trimestre de l’année prochaine… L’OZMOSE 2008 d’Eric Rominger est une nouvelle étape dans la mise en valeur du travail de ce vigneron attaché à son terroir fétiche, le Zinnkoepflé. J’espère bientôt voir la mention Grand Cru Zinnkoepflé sur ces étiquettes car je ne vois pas pourquoi ce vin ne le mériterait pas ! Enfin le Criots-Bâtard-Montrachet 2004 a tenu son rang de Grand Cru, à la fois par sa puissance et par sa capacité de garde dans un millésime moyen. Quant au Chassagne-Montrachet 2009 de Bouchard Père & Fils, tout a déjà été dit…
Il ne me reste qu’à vous remercier, chers lecteurs, de votre fidélité à ce blog ! Et en cette fin d’année 2013, je vous souhaite à tous de très belles fêtes. Que 2014 soit nous réserve au moins autant de révélations que cette année charnière que fut 2013…
In vino veritas !